Détournement des fonds alloués à des projets non exécutés à la DG/Eau : Les Pays-Bas réclament 3.2 milliards Fcfa à l’Etat béninois

Détournement des fonds alloués à des projets non exécutés à la DG/Eau : Les Pays-Bas réclament 3.2 milliards Fcfa à l’Etat béninois

Pour le détournement des fonds alloués au financement de plusieurs projets du secteur de l’eau en milieu rural, les Pays-Bas réclament au Bénin via la Direction Générale de l’Eau (DG/Eau) où le scandale vient d’éclater, la bagatelle somme de 3,175 milliards de francs CFA. C’est ce qui ressort des deux rapports de l’audit commandité par les Pays-Bas à ce sujet et dont la version provisoire vient d’être déposée sur la table du Directeur général de l’Eau et de la lettre de dénonciation adressée par un citoyen au Président de la République, Dr Boni Yayi.

 C’est par une lettre de transmission en date du 7 avril 2015 que le cabinet d’audit recruté par les Pays-Bas a déposé ses rapports sur la table du Directeur général de la DG/Eau sollicitant ses observations (Voir copies des lettres en annexe). Mais déjà, il convient de dire que les informations contenues dans ces rapports provisoires d’audit sont accablantes et méritent une intervention rapide et musclée du Chef de l’Etat, Dr Boni Yayi.

En effet, les grandes conclusions de ces rapports d’audit reprises dans sa lettre de dénonciation au chef de l’Etat par un citoyen du non de Kora-Gounou Imorou révèlent de graves distorsions à l’orthodoxie financière opérées par un opérateur économique en complicité avec certains cadres et responsables de la DG/Eau et du ministère de l’Energie et de l’Eau.

De cette lettre de dénonciation il convient de retenir que les projets sur lesquels ces malversations (à hauteur de 3.175 milliards) ont été opérées font partie d’un vaste programme conjointement financés par un don du Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas à travers son ambassade au Bénin et l’Union Européenne à travers sa délégation au Bénin pour un montant de 46, 146 milliards de francs CFA pour une période de trois ans allant de 2013 -2015.La tranche annuelle de 2014 pour un montant de 3,7 milliards de francs CFA est exécutée selon un plan de travail annuel harmonisé avec le comité de pilotage mis sur pied à cet effet.

Mais force est de constater qu’un opérateur économique a mis à contribution tous les acteurs de la chaîne de dépenses publiques du ministère en charge de l’Eau pour vider les caisses du programme.

La stratégie utilisée pour détournée les fonds des projets

Selon cette lettre de dénonciation, le mode opératoire est celui déjà utilisé par l’opérateur économique pour la livraison en 2012 des GPS au ministère de l’agriculture au coût unitaire de 3,2 millions de francs CFA.  Cette stratégie consiste à proposer à coût de millions des offres de travaux, de service ou de livraison non répertoriées par le référentiel des prix et d’utiliser pour la besogne des établissements ou sociétés créées pour l’opération avec des noms des personnes décédées au titre de la gestion concernée. A la fin de l’année, la Direction du Trésor est mise en contribution pour le paiement rapide des factures, les comptes ouverts dans les banques primaires sont ensuite vidés et l’opération prend fin. D’autres sociétés ou établissements sont créés pour l’année budgétaire suivante.   Ainsi, au titre de la gestion 2014, l’ensemble des opérations porte sur 3,7 milliards de dépenses engagées et liquidées au profit de l’opérateur et de ses compagnons pour des offres de service non réalisées.

Ce que révèlent les rapports d’audit

Il faut dire que les deux rapports d’audit, le premier relatif au sous-programme « Approvisionnement Eau Potable » et l’autre portant sur « Gestion Intégrée des Ressources en Eau » déposés par le cabinet d’audit révèlent  de graves informations.

Il s’agit notamment de la livraison de consommables informatiques non prévus au plan de travail harmonisé et n’ayant aucun lien avec l’approvisionnement en eau potable à des prix exorbitant (cas de disque dur 500 Go à 725 000 francs CFA l’unité ; GPS à 3000 000 francs CFA). Alors que sur le sous-programme approvisionnement en eau potable, il est prévu uniquement des adductions d’eau villageoises pour desservir un grand nombre de populations, des travaux pour un montant de 59 millions de francs CFA par société et ou établissement pour la réalisation des forages munis de pompe à motricité humaine et réfection des Services de l’Eau, ont été octroyer aux sociétés et ou établissements crées par l’opérateur économique en 2014. Pour ces contrats de marché dont le montant global avoisine 1,32 milliards, il n’existe aucun document contractuel.

 Mieux, sur les cinq (5) forages à réaliser au profit de la commune de Matéri, seulement un (1) a été réalisé, les trois dernières années. De même sur les cinq (5) forages prévus au profit de la commune de Toucoutouna, trois (3) ont été réalisés. Un autre cas troublant est celui des travaux de réfection de bureau des Services Eau, Ouémé, Direction Générale de l’Eau. Pour ces travaux, il n’existe aucun document à savoir procès-verbaux de dépouillement, contrat, procès-verbaux de réception ayant permis le mandatement. En somme, des travaux initiés sans devis quantitatif estimatif. Pour ce qui est du sous-programme « Gestion Intégrée des Ressources en Eau » les mêmes dépenses relatives aux achats/acquisitions non prévus au plan de travail harmonisé sont payées alors que les travaux réguliers inscrits pour un montant de 700 millions n’ont pu franchir les seuils du Trésor. Les marchés de fournitures de bureau, de consommables informatiques, de pneumatiques et de batteries non-inscrits au plan de travail harmonisé ont été conclus à des prix très élevés.

De même les marchés de biens et services portant sur les mêmes objets et pour la même période sont fractionnés pour couvrir les sociétés ou établissements de l’opérateur économique. Les objets des entreprises attributaires figurant dans leur registre de commerce ne sont pas en lien avec les biens et prestations fournies. L’on note encore que sur seize (16) bons de commandes de même objet n’ayant aucun lien avec les activités du sous-programme dix (10) ont été engagés le même jour et six (6) dans le même mois. Les sociétés ou établissements attributaires ne sont pas spécialisés dans la livraison des articles. Les entreprises sont toutes créées en 2014 et ont le même objet. A tout cela il faut ajouter que les onze (11) autres bons de commandes de matériels informatiques n’ayant aucun lien avec le programme, dont quatre (4) sont engagés le même jour et sept (7) dans le mois de février 2014. Pour avoir une autre idée de la taille des surfacturations les rapports d’audit révèlent que le prix moyen unitaire d’un pneu est de 425 000 francs CFA et celui de la batterie est de 95 000 francs CFA.

Le Bénin sommé de remboursé par les Pays-Bas

Face à l’ampleur dévastatrice des malversations opérées, les Pays-Bas par le biais de leur représentation nationale a monté le ton et réclame d’ores et déjà au Gouvernement béninois via la DG/Eau le remboursement de la somme de 3,175 milliards de francs CFA pour la seule période de 2014 sous revue dont 1,815 milliards sur le sous-programme «Approvisionnement Eau Potable » et 1,360 milliards surs le sous-programme  « Gestion Intégrée des Ressources en Eau ». Car les projets prévus n’ont pas été exécutés et les sous détournés.

Notons également que ce remboursement de montant 3,175 milliards réclamé par les Pays-Bas ne prend pas en compte les limitations de dépenses portant sur 615 millions, soit respectivement 410 millions francs CFA pour le premier sous-programme et 205 millions francs CFA pour le deuxième.

Face à ce nouveau scandale qui éclabousse sa gouvernance en pleine campagne électorale pour les législatives Boni Yayi doit frapper fort et très fort pour décourager de telles pratiques qui déshonorent notre pays.

Thierry Sallon

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